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L’usage des trottinettes électriques a fait l’effet d’une bombe dans le monde du transport. Notamment quand leurs usagers sont devenus victimes de dommages corporels (choc avec un scooter, un piéton, ou autre …). Et ce, qu’ils soient à l’origine de l’accident ou non. En fonction des circonstances, de la temporalité des faits, la procédure d’indemnisation des dommages corporels peut être laborieuse. En effet, un assureur de responsabilité civile peut refuser de garantir les dommages causés.

 

Quelle réglementation applicable pour les trottinettes ?

S’agissant des trottinettes électriques, c’est le décret du 23 octobre 2019 qui s’applique.

Si on se situe avant l’entrée en vigueur du décret, il faut distinguer les trottinettes électriques homologuées des autres. Car l’homologation donne la possibilité de circuler … sur la route !

Ainsi, une trottinette homologuée peut dépasser la vitesse des 25 km/h. Elle est identifiée aux services préfectoraux (elle a donc un numéro d’identification). Elle porte une plaque d’immatriculation. Le droit de la conduire est subordonné à l’obligation de détenir le permis de conduire ou le brevet de sécurité routière, l’obligation de porter un casque, l’interdiction de circuler sur les trottoirs, l’obligation d’assurer son engin. En cas d’absence d’assurance, le Code de la route sanctionne (article L324-2 du Code de la Route).

Une trottinette non homologuée ne peut pas circuler sur la route. Si sa vitesse est supérieure à 6 km/h (sans pour autant dépasser les 25 km/h), elle assimilée à un engin motorisé par les juges. Dans le cas contraire (donc vitesse inférieure à 6 km/h), elle est assimilée à un piéton et peut donc circuler sur le trottoir.

La qualification d’engin motorisé emporte l’interdiction de circuler sur le trottoir (à moins de circuler en dessous des 6 km/h), l’obligation de porter un casque et d’assurer la trottinette.

Conséquence, un vide juridique s’est installé. Où circule-t-on si la vitesse est comprise entre 6 et 25 km/h et qu’on ne peut ni aller sur le trottoir ni aller sur la route ? La réponse est donnée par les communes qui tolèrent la circulation des trottinettes sur les aires piétonnes et les trottoirs.

 

Quelles règles appliquer en cas d’accident de la circulation impliquant une trottinette électrique ?

Pour tenter de donner une explication simple, il y lieu de distinguer les différents acteurs des faits.

Par exemple, s’il s’agit d’un accident entre une trottinette non motorisée et un piéton, l’accident se crée entre « piétons » et la responsabilité civile du conducteur de la trottinette ou du piéton pourra être engagée.

S’il s’agit d’un accident causé par une trottinette électrique homologuée et qu’il engendre des dommages à un piéton, alors le régime de la loi BADINTER viendrait à s’appliquer. On assimile alors les faits à ceux d’un accident impliquant un véhicule à moteur (la trottinette). L’assureur de la trottinette électrique pourra en principe prendre en charge l’indemnisation du piéton victime.

 

Et si j’ai un accident avec une trottinette ? Suis-je couvert ?

C’est toujours la même chanson. Il faut distinguer entre les trottinettes non électriques, électriques mais non homologuées, et électriques et homologuées.

Rappelons que les trottinettes électriques doivent faire l’objet d’une assurance obligatoire (L211-1 du Code des Assurances).

Rappelons aussi que le régime applicable (responsabilité civile ou application de la loi BADINTER) se détermine en fonction du modèle de la trottinette. En effet, le conducteur d’une trottinette non électrique ou non homologuée mais qui circule en dessous des 6 km/h, est assimilable à un piéton. Et donc l’accident causé par lui sur un piéton emporte application du régime de sa responsabilité civile (et l’assureur de responsabilité civile est alors susceptible d’intervenir).

Mais si l’usager conduit une trottinette électrique (homologuée ou non), et circule au-delà des 6 km/h autorisés au moment de l’accident, alors il est considéré comme conducteur d’un véhicule terrestre à moteur (et la loi BADINTER est appliquée).

L’assurance de la trottinette électrique devrait alors venir indemniser le piéton victime de dommages corporels à la suite de l’accident de la circulation.

 

Qui du loueur ou du locataire doit assurer la trottinette électrique pour couvrir les risques d’accident ?   

D’abord, l’obligation d’assurance découle de l’article L211-1 du Code des assurances. Celui dispose notamment qu’il appartient « à toute personne (…) dont la responsabilité civile peut être engagée en raison de dommages subis par des tiers (…) dans la réalisation desquels un véhicule est impliqué, doit, pour faire circuler celui-ci, être couverte par une assurance (…) ».

Comme tout contrat de location de véhicule (type automobile), le loueur ou le prêteur devrait pouvoir justifier de la bonne souscription d’une assurance pour ses trottinettes (quitte à prévoir dans le contrat de location de le répercuter sur le locataire). En effet, les locataires n’étant que des conducteurs occasionnels de ces engins motorisés, il y a lieu pour eux de ne pas se soucier de l’assurance obligatoire.

C’est d’ailleurs la position de la Cour de Cassation qui, dans un arrêt du 15 décembre 2005, a rappelé que « l’obligation de souscription d’assurance incombait, en application de l’article L211-1 du Code des Assurances, à la société X [prêteur], propriétaire du véhicule, et non à Monsieur Z [conducteur occasionnel] (…) ». (Cour de cassation, Civ2, 15 décembre 2005)

Dans le cas contraire, le locataire pourrait toujours tenter de se défendre sur le plan contractuel ou encore sur le plan du droit de la consommation.

 

Si je prête ma trottinette électrique à mon enfant mineur, et que celui-ci cause un accident, suis-je couvert ?

Attention aux clauses contractuelles de votre assurance de responsabilité civile ! Celle-ci ne couvre peut-être pas les dommages causés à un tiers en raison de l’accident produit par un véhicule à moteur.

Et la trottinette électrique peut être considérée comme un véhicule à moteur.

C’est ce que juge, par exemple, la Cour d’Appel de Nîmes, dans un arrêt du 23 février 2010. Elle y définit la trottinette utilisée « à vive allure » sur la voie publique par une jeune fille mineure en ces termes : « cette trottinette est un engin à moteur doté de roues lui permettant de circuler et pilotée par une personne ; elle constitue un véhicule à moteur concerné par l’exclusion du contrat d’assurance. (…) ».

Conclusion, l’assurance de responsabilité civile des parents ne couvre pas, en principe, les dommages causés par leurs enfants en cas d’accident de la circulation. C’est la loi BADINTER qui s’applique. Par conséquent, l’assurance couvrant l’engin devrait garantir l’indemnisation due à la victime.

Morale de l’histoire : il faut absolument vérifier que l’engin électrique utilisé soit assuré pour éviter tous déboires juridiques.

Pour en savoir plus sur les suites indemnitaires : voir l’évaluation des préjudices